Sommaire de l'article
Sommaire de la série
- Introduction
- 1°) Différents types de logiciel
- 2°) Présentation générale des logiciels
- 3°) a) Quel logiciel biblique pour la critique textuelle de l’Ancien Testament ?
- 3°) b) Quel logiciel biblique pour la critique textuelle du Nouveau Testament ?
- 4°) Lecture du texte dans son contexte immédiat
- 5°) Traduction
- 6°) Philologie
- 7°) Intertextualité
- 8°) Littérature secondaire et autres outils
- 9°) Bons plans
- Synthèse : quel logiciel pour l’exégèse biblique ?
Accordance, Bible Parser, Bibleworks et Logos sont certainement les meilleurs outils informatiques existants pour l’exégèse biblique, mais ils ne sont pas tout à fait conçus de la même manière.
a) Qualité
Accordance, Bibleworks, Logos Professionnels
Bible Parser Amateur
Accordance, Bibleworks et Logos sont des logiciels professionnels développés par des sociétés employant de sept salariés pour Bibleworks jusqu’à plus de 450 pour Logos[1]. Ces logiciels sont donc de très bonne qualité. Les bases de données sont élaborées et vérifiées par des biblistes reconnus. De plus, ces logiciels étant utilisés par de nombreux utilisateurs, les développeurs peuvent régulièrement corriger leurs bases de données lorsque les utilisateurs signalent une erreur. Enfin, l’interface de ces logiciels est conçue par des informaticiens chevronnés qui effectuent régulièrement des mises à jour et corrigent les bugs éventuels dès qu’ils sont découverts.
Bible Parser est un logiciel amateur, conçu et diffusé par un seul homme, Didier Fontaine. Même si le développeur est un passionné de linguistique biblique, formé en lettres classiques ainsi qu’en grec et hébreu bibliques, il n’est ni enseignant en théologie, ni informaticien. Didier Fontaine développe donc le logiciel sur son temps libre ! On ne peut donc avoir les mêmes exigences, en terme de qualité, que pour les trois autres logiciels. Si la version 2015 a permis une nette amélioration en ce qui concerne la stabilité et la facilité d’utilisation, Bible Parser reste un peu plus sujet aux « bugs » que ses concurrents. De même, les bases de données ne sont pas toujours d’une qualité scientifique et elles sont contrôlées par un moins grand nombre d’utilisateurs. Toutefois, le développeur est très réactif lorsqu’une erreur lui est signalée : des mises à jour sont publiées très régulièrement.
b) Logiciel biblique ou bibliothèque exégétique électronique ?
Les logiciels comparés ne sont pas tous du même type. Ainsi, Bibleworks est un logiciel de recherche biblique exégétique. Son usage premier est de former une sorte de « super-concordance » électronique. On utilise d’abord Bibleworks pour rechercher un mot, une expression ou une construction particulière au sein des textes bibliques grecs et hébreux, de la littérature juive ou chrétienne anciennes. A côté de cette fonction principale, un certain nombre d’outils sont venus se greffer, ce que nous verrons par la suite.
Le logiciel Logos est avant tout destiné à gérer une bibliothèque électronique composée d’éditions de textes anciens, d’ouvrages exégétiques et théologiques. Avec Logos, on achète des textes, commentaires, dictionnaires et ouvrages divers que Logos a préalablement transformés en bases de données (analyse morphologique, étiquettes syntaxiques, etc.). Le logiciel permet de faire des recherches informatiques parmi ces documents mais surtout, il les met en relation grâce à des liens hypertextes ou par des outils très performants qui compilent automatiquement les différentes données contenues dans sa bibliothèque au sujet d’un passage biblique, d’un thème ou d’un mot.
Accordance essaye de combiner les deux approches. Historiquement, comme son nom l’indique, le logiciel fut d’abord une « super-concordance » à la manière de Bibleworks. Mais, il propose également un bon catalogue de fonctions et d’ouvrages supplémentaires qui font désormais d’Accordance un vrai logiciel de gestion de bibliothèque électronique exégétique.
Bible Parser est encore différent : d’un côté, il compile sous forme de « modules » des données issues de diverses sources. Toutefois, il est moins performant dans cette compilation qu’un logiciel comme Logos. D’un autre côté, Bible Parser réunit une immense bibliothèque d’ouvrages exégétiques libres de droit scannés, au format PDF ou DjVu.
Conséquences sur le tarif et l’évolutivité du logiciel
Accordance | Bible Parser | Bibleworks | Logos | |
---|---|---|---|---|
Logiciel de base | Collections de 0 à 30 000 $ | 30 € (logiciel seul) ou 55 € (logiciel + bibliothèque d’ouvrages PDF) | 389 $ | Collections de 295 à 10 800 $ ou par abonnement (de 9 à 50 $ par mois) |
Modules supplémentaires | Bon catalogue avec les meilleures ressources exégétiques | Patrologies de Migne et quelques ouvrages sur demande | Quelques modules. | Immense catalogue ! |
Quand on achète Bibleworks, on achète un logiciel complet à 389 $, auquel l’on peut éventuellement ajouter quelques modules supplémentaires. Parmi ceux-ci, on retrouve le texte des manuscrits non-bibliques de la mer Morte, les apparats critiques de référence (NA28, UBS5, BHS, BHQ, LXX), quelques grands dictionnaires et quelques commentaires. Toutefois, le catalogue de modules supplémentaires est volontairement limité.
Avec Accordance ou Logos, on n’achète pas un logiciel, mais plutôt un ensemble de bibles, dictionnaires, commentaires ou autres ouvrages autour de la Bible. Cet ensemble constitue une « bibliothèque » que l’on ne pourra bien entendu consulter qu’à partir du logiciel associé.
Ainsi, avec Accordance, il est possible de choisir parmi plusieurs bibliothèques de base dont le prix varie entre 0 (version « lite » gratuite) et 30 000 $. On pourra ensuite ajouter à sa bibliothèque les différents ouvrages ou bases de données achetés au sein du catalogue proposé sur le site d’Accordance. Celui-ci contient la plupart des meilleures éditions critiques des textes anciens, des meilleurs dictionnaires bibliques et des meilleures séries de commentaires bibliques (en anglais).
Avec Logos, le logiciel de base et gratuit. Mais on ne dispose alors que d’une interface vide. Il faut y ajouter des ressources ou des fonctionnalités supplémentaires. Certaines ressources sont gratuites. Mais la plupart sont payantes. Pour une utilisation optimale du logiciel, il est préférable d’acheter une bibliothèque de base dont les prix vont de 295 $ à 10 800 $ (hors promotions ou réductions). Le catalogue de Logos contient plus de 16 000 titres : on y trouvera pratiquement tous les ouvrages anglophones du rayon « usuels » des meilleures bibliothèques théologiques universitaires.
Logos propose également une formule par abonnement intitulée « Logos Cloud » (voir ma présentation ici). : pour 9 à 100 $ par mois, on peut accéder à une bibliothèque de base contenant un certain nombre de fonctionnalités, et plusieurs centaines d’ouvrages.
Bible Parser propose essentiellement des textes ou documents libres de droit. De plus, il est produit par un amateur passionné, sans objectif commercial. Son prix est donc relativement bas : pour 30 €, le bibliste a accès à un logiciel complet par téléchargement. S’il ajoute 25 €, il recevra le logiciel sur clé USB, accompagné d’une immense bibliothèque d’ouvrages exégétiques au format PDF ou DJVu.
Avantages et inconvénients d’une bibliothèque électronique
Avantages | Inconvénients |
---|---|
Bibliothèque légère et mobile | Lecture moins agréable que sur papier |
Les livres ne peuvent pas se perdre | Les livres ne peuvent pas être prêtés |
Des livres transformés en bases de données | Incertitude quant à l’avenir de sa bibliothèque |
Gain de temps et d'argent |
Avant de se lancer dans l’achat d’un logiciel biblique coûteux, il faut donc se poser la question de la manière dont vous pensez constituer votre bibliothèque théologique personnelle : est-ce que vous allez dans les prochaines années investir dans des livres papiers ou dans des livres électroniques ?
Se constituer une bibliothèque électronique plutôt que papier a plusieurs avantages :
- Premièrement, il n’est pas nécessairement besoin de négocier avec son conjoint l’aménagement d’une bibliothèque ! Elle tient sur un ordinateur.
- Deuxièmement, la bibliothèque électronique est mobile : elle devient accessible depuis n’importe quel ordinateur ou même, selon les logiciels, sur sa tablette ou son smartphone.
- Troisièmement, il n’est plus possible de perdre un livre, ni de se le faire voler car il est stocké sur le nuage. En cas de vol de son ordinateur ou de problème avec son disque dur, il est possible, à tout moment, et sur n’importe quel ordinateurs, de télécharger à nouveau le logiciel avec les ouvrages achetés. Pour cela, il suffit d’entrer son nom d’utilisateur et mot de passe.
- Quatrièmement, l’utilisateur n’achète pas seulement un ouvrage exégétique de référence, il achète une version magnifiée de cet ouvrage au sein duquel il est possible de faire des recherches informatiques. Par exemple, avec Accordance ou Logos, on peut chercher au sein d’un ouvrage toutes les pages qui contiennent telle référence biblique ou tel mot.
- Cinquièmement, et c’est là l’atout principal, le logiciel compile et met en relation les différents livres de la bibliothèque électronique.
Prenons un exemple : lors de la consultation d’un verset donné, l’utilisateur souhaite consulter les commentaires de sa bibliothèque sur ce verset. En un clic, Logos ou Accordance indique tous les commentaires sur ce verset et les ouvrent à la bonne page. De plus, si le commentaire contient une référence biblique, le texte correspondant s’affiche dans une bulle, et d’un simple clic il est possible d’ouvrir le texte biblique à l’emplacement de cette référence. Cela ne vaut pas que pour le texte biblique, c’est aussi le cas pour les références d’un manuscrit de Qumran, ou d’un texte de Josèphe, Philon ou de tout autre texte ancien de votre bibliothèque électronique. En un clic, on peut vérifier les références citées par le commentaire.
Autre exemple : il est possible de consulter sur Logos la dernière version du fameux dictionnaire de grec classique de Liddell, Scott et Jones (LSJ). Or, celui-ci contient de nombreuses abréviations de textes anciens que les non-spécialistes auront du mal à reconnaître sans avoir recours à l’index des abréviations. Avec Logos (tout comme avec Accordance), toutes les abréviations sont explicitées lorsque l’on passe la souris dessus. Mieux, si la base de données Perseus, gratuite pour Logos, est installée, le lien sera fait entre toutes les références du LSJ et les textes classiques cités par celui-ci : en un clic, il est possible de consulter directement le texte grec.
- Sixièmement, les prix des ouvrages électroniques sont généralement inférieurs à ceux des ouvrages papiers, et il est parfois possible de faire de très bonnes affaires.Cinquièmement, et c’est là l’atout principal, le logiciel compile et met en relation les différents livres de la bibliothèque électronique.
Le principe d’une bibliothèque électronique est donc séduisant. Cependant, il convient d’en souligner aussi quelques inconvénients[2].
- Premièrement, même si Accordance ou Logos permettent la lecture sur tablette, lire sur un écran reste généralement moins agréable et plus fatiguant que sur du papier.
- Deuxièmement, il n’est pas possible de prêter ses livres[3].
- Troisièmement, et c’est là l’argument principal, les livres ne sont lisibles qu’avec un logiciel donné. Or, le monde de l’informatique évolue très rapidement : il n’est pas possible de savoir si, d’ici quelques années, Accordance ou Logos n’obligeront pas leurs utilisateurs à acheter une mise à niveau du logiciel pour pouvoir lire leurs livres avec leur matériel informatique qui aura lui aussi évolué. Ou pire, qu’arrivera-t-il de ces ouvrages électroniques si leurs éditeurs font faillite et ne mettent donc plus à jour leurs logiciels en fonction de l’évolution du matériel informatique ? Cette question ne se pose pas avec un ouvrage papier : à moins d’une inondation, d’un incendie ou d’un vol, il sera encore possible de l’ouvrir dans 50 ans.
Il convient donc de mesurer le risque avant de se lancer dans l’achat d’un ouvrage électronique, surtout si son prix est élevé.
Notons cependant que la formule de Logos par abonnement (Logos Cloud) permet d’écarter le dernier risque évoqué : désormais, il est possible de « s’abonner » au logiciel, pour quelques euros par mois, sans engagement.
De plus, une autre donnée est à prendre en compte : Accordance et Logos se lancent aujourd’hui dans l’édition d’ouvrages scientifiques uniquement électroniques. L’exemple le plus frappant est celui de l’entreprise Faithlife qui édite Logos. Celle-ci ne conçoit pas seulement plusieurs logiciels pour la lecture d’ouvrages religieux, mais elle édite également de plus en plus d’ouvrages à travers sa filiale Lexham Press[4]. Celle-ci édite de nouvelles traductions anglaises de la Bible, une Bible d’étude, un dictionnaire biblique, plusieurs séries de commentaires bibliques, mais aussi de nouvelles éditions des textes originaux en collaboration avec la SBL ou des biblistes plus ou moins renommés. Entre autres, elle propose sa propre édition des manuscrits bibliques de la mer morte ; ou encore elle travaille sur une traduction anglaise du fameux ouvrage de Strack et Billerbeck. Bien entendu, la plupart de ces ressources ne peuvent être consultées qu’à partir des logiciels produits par Faithlife. De telle sorte que l’on devient obligé de posséder leur logiciel si on veut pouvoir accéder à ces ouvrages dont certains ont une véritable valeur scientifique.
De fait, qu’on le veuille ou non, l’avenir de nos bibliothèques sera, au moins en partie, sur support informatique.
[1] La présentation de la société Logos sur son site vaut le détour : https://www.logos.com/about/company .
[2] Le site de Bibleworks propose des liens vers plusieurs articles soulignant ces inconvénients, à voir en bas de la page suivante : http://store.bibleworks.com/modules.html
[3] Il est toutefois possible de les revendre ou de les donner, en demandant à Accordance ou Logos de transférer ses ouvrages à l’acheteur ou le bénéficiaire du don.
[4] Pour voir le catalogue complet des ouvrages publiés par Lexham Press, rendez-vous ici : www.logos.com/lexham.
Joseph
Il y a environ 450 employées chez Faithlife.
admin
Merci Joseph pour la rectification : j’ai mis à jour l’article avec le bon chiffre. Il faut dire qu’il y a tellement de mouvement chez Faithlife que c’est difficile à suivre.